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30 septembre, 2025
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Gaz lacrymogène contre la craie : les enseignantes contractuelles étouffées à Niamey

À Niamey le 29 septembre 2025, une manifestation spontanée pacifique d’enseignants contractuels avec une forte proportion féminine réclamant leurs salaires s’est transformée en scène de chaos. Gaz lacrymogènes, violences policières et hospitalisations : l’éducation, déjà fragilisée, paie le prix d’une gouvernance qui substitue la force au dialogue.

La rentrée scolaire qui s’annonçait déjà compromise a pris une tournure dramatique ce lundi à l’hôtel des postes de Niamey. Ce qui devait être une simple manifestation pacifique d’enseignants contractuels réclamant leurs salaires s’est mué en un véritable cauchemar. À l’appel de la Dynamique des Syndicats du Secteur de l’Éducation et de la Formation (DSSEF), des dizaines d’enseignants se sont rassemblés pour exprimer leur ras-le-bol face aux retards de paiement répétés. Mais la réponse des forces de l’ordre fut d’une brutalité qui a choqué plus d’un.

L’usage disproportionné de gaz lacrymogènes contre ces éducateurs sans défense a plongé la foule dans la panique. Parmi les victimes, des femmes, des personnes asthmatiques, et même un nourrisson, ont été terrassés par des crises respiratoires. Plusieurs ont dû être hospitalisés dans l’urgence, symbole d’un pouvoir qui semble avoir choisi la répression au lieu du dialogue social.

Dans son communiqué, la DSSEF affirme avec indignation : « Nous condamnons avec la plus grande fermeté l’usage disproportionné et barbare de la force contre des enseignants contractuels qui attendent leurs salaires 29 jours après la fin du mois précédent, soit 60 jours. De telles pratiques sont indignes d’un État de droit et bafouent les libertés fondamentales et la dignité humaine. »

Pour les syndicats, ce mode de gestion n’est pas seulement une injustice salariale mais une véritable humiliation. « Nous dénonçons vigoureusement le mode de paiement nonchalant et discontinu, ce qui engendre du coup des frustrations », poursuit le texte. Derrière ces mots se cache une réalité cruelle : comment des éducateurs, déjà précarisés par leur statut contractuel, peuvent-ils exercer leur mission sereinement alors que leurs familles manquent de ressources vitales ?

Plus inquiétant encore, la DSSEF tire la sonnette d’alarme sur une dérive autoritaire inquiétante : « Nous nous alarmons de la brutalité policière qui semble devenir un mode de gouvernance, mettant en danger l’intégrité physique et la vie des citoyens nigériens. » En d’autres termes, la répression de Niamey n’est pas un incident isolé mais le symptôme d’un choix politique où la force supplante le droit.

Face à cette escalade, les syndicats promettent de ne pas se taire. « Nous nous réservons expressément le droit de porter plainte contre les auteurs, commanditaires et tous les acteurs de cette barbarie, afin qu’ils répondent de leurs actes devant la justice. » Un appel fort qui résonne comme un défi lancé aux autorités. La DSSEF exige aussi l’ouverture « immédiate d’une enquête indépendante pour établir les circonstances exactes de cette intervention et identifier toutes les responsabilités. »

Au-delà du scandale, cette affaire révèle un malaise plus profond : la dévalorisation chronique du secteur éducatif. Chaque rentrée est marquée par des retards de salaires, des grèves, des promesses non tenues. Une spirale qui affaiblit l’école publique et compromet gravement l’avenir des enfants nigériens.

Il est temps de rappeler une évidence : une société qui humilie ses enseignants creuse sa propre tombe. L’éducation est le socle de toute nation, et ceux qui la portent méritent respect, protection et considération. Opposer la force à leurs revendications légitimes, c’est non seulement une faute politique, mais un crime moral.

L’histoire retiendra peut-être ce 29 septembre 2025 comme une date sombre, où l’État a choisi d’étouffer ses enseignants plutôt que de les écouter. Mais elle retiendra aussi la détermination des syndicats qui, malgré la peur et la violence, promettent de rester mobilisés « jusqu’à ce que justice soit pleinement rendue. »

Mahamadou Tahirou

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