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18 août, 2025
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Bras de fer Saman/Gouvernement : Vers une sortie de crise ?

La dissolution brutale des syndicats du secteur judiciaire par le gouvernement, suivie de la radiation du Secrétaire général et du Secrétaire général adjoint du Syndicat autonome des magistrats du Niger (SAMAN), a plongé le pays dans une crise institutionnelle inédite. En riposte, une grève illimitée a été déclenchée, massivement suivie par les magistrats, paralysant le fonctionnement des juridictions et révélant l’ampleur du malaise. Cette mobilisation traduit non seulement la détermination des magistrats à défendre leur autonomie, mais aussi une inquiétude grandissante face à ce qui est perçu comme une attaque frontale contre la liberté syndicale et l’indépendance de la justice.

C’est dans ce climat tendu, qu’un groupe de bonnes volontés composé des anciens membres du comité de révision du code pénal, du Bâtonnier du Niger, du Président de la Commission Paix, Sécurité et Réconciliation, ainsi que du  Secrétaire permanent du Dialogue social, ont réussi à réunir autour de la même table, le Ministre de la Justice et son équipe, et un collège de magistrats, anciens cadres du syndicat dissous, pour faciliter la reprise du dialogue. Cette initiative apparaît comme une tentative de réconciliation. A l’issue de deux jours d’intenses médiations, un appel est lancé le 17 août 2025 par le collège d’anciens cadres du SAMAN dissouts à l’endroit de leurs collègues.

L’appel signé par ces anciens responsables ne nie pas la gravité de la crise, mais propose un chemin vers l’apaisement. Les termes employés, notamment la référence au « rétablissement de certaines situations malheureuses », laissent entrevoir la possibilité d’une réhabilitation des dirigeants radiés, et nourrissent l’espoir d’une issue honorable pour toutes les parties.

L’appel n’a donc rien d’une capitulation. Il constitue plutôt un pari sur la bonne foi des médiateurs et des autorités. Les signataires pèsent sur le sens de responsabilité et de patriotisme des magistrats, les invitant à regagner leur poste tout en faisant confiance aux acteurs engagés dans la résolution du conflit. Autrement dit, il s’agit de suspendre l’affrontement direct pour ouvrir un espace de négociation susceptible de sauver à la fois la dignité des magistrats et la crédibilité du gouvernement.

Toutefois, une question demeure, est ce que, les militants, jusque-là solidaires de leurs dirigeants radiés, accepteront-ils cette main tendue ? Pour beaucoup, le retour au travail ne peut s’envisager sans un geste fort en faveur de la réintégration des responsables exclus. Le silence du gouvernement sur ce point pour l’instant, maintient une zone d’ombre qui pourrait fragiliser la démarche de médiation.

L’avenir du SAMAN dissous et, plus largement, celui du syndicalisme judiciaire au Niger, dépend désormais de la sincérité des engagements pris. Si le gouvernement pose des actes de confiance qu’il s’agisse d’une réhabilitation officielle, d’une levée de sanctions ou de l’ouverture d’un cadre de concertation durable, la justice nigérienne pourrait sortir renforcée de cette épreuve, en consolidant son rôle de pilier de l’État de droit.

En revanche, si aucune mesure concrète n’accompagne l’appel, la fracture risque de se rouvrir, plus profonde encore, avec des conséquences non seulement sur le fonctionnement des tribunaux mais aussi sur la confiance des citoyens dans leurs institutions. La justice, déjà fragilisée par cette crise, ne peut rester indéfiniment en suspens. La balle est désormais dans le camp des autorités, qui ont le choix entre prolonger le bras de fer ou transformer cette crise en opportunité de dialogue.

Mahamadou Tahirou

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