Même si on n’aime pas le lièvre on doit admettre qu’il court vite, selon le dicton. Ni correspondant de guerre, ni journaliste au sens scolastique, par la force des choses, Hamid N’gadé s’impose comme l’activiste le plus renseigné, le plus influent et certainement l’un des plus crédibles au sein de l’opinion publique nigérienne.
Au Niger, où l’information est contrôlée et essorée pour ne servir que de propagande, les rares sources d’information de qualité sont appréciées : N’gadé en fait partie. Incontestablement.
Sous son impulsion comme Conseiller principal en communication du président Bazoum, jamais la Com présidentielle n’a été aussi transparente, moderne et à la portée de tous.
En exil depuis le coup de Jarnac du 26 juillet avec ses collaborateurs de l’ex Cellule de communication, notamment Maidilili Namu, le redoutable chroniqueur de « Muduba Mugani » et Abdou Pagoui alias « citoyen du monde », N’gadé et son équipe ont fait montre de ténacité, de constance et résilience en donnant un autre son de cloche. En refusant de disparaitre ou de se taire, ils font figure de résistants face à un pouvoir qui a réprimé ou fait fermer toutes les radios internationales indépendantes. Ces radios ou télés puissantes et disposant de correspondants partout dans le monde acheminaient l’information jusqu’au plus petit village de notre pays. Cela a irrité les militaires, ils les ont fermées. Et ils se portent bien ces putschistes ; du moins se portaient bien jusqu’à ce que Hamid N’gadé et ses camarades s’investissent pour apporter l’information partout, à travers les réseaux sociaux.
Encombrants et iconoclastes pour les autorités de fait, ces fidèles du Président Bazoum après avoir été traités par tous les noms d’oiseaux sauvages ont fini par perdre leur nationalité en application de l’ordonnance portant déchéance de nationalité. Ils ont perdu leur nationalité et ont gagné en crédibilité et respectabilité auprès de notre opinion. On doit admettre cela.
Le phénomène Hamid N’gadé
C’est connu, les services secrets des régimes autoritaires n’acceptent pas qu’on rende publiques les informations classées notamment dans le domaine de la sécurité, et tout particulièrement le bilan sécuritaire de certaines attaques. Et la spécialité de N’gadé c’est justement les publications de ce genre d’informations très sensibles.
Certains communicants et coupeurs de cheveux en quatre, soutiens de la junte ont vainement tenté de le présenter comme un terroriste ou un agent à la solde de l’impérialisme. Et pourtant dans ce pays, sans que jamais ils n’aient été inquiétés et dans un passé proche, certains de nos compatriotes étaient devenus les rapporteurs de toutes les attaques et tous les bilans sur leurs pages Facebook. Ces diffuseurs sont encore là, mais ils font autre chose maintenant.
A mon humble avis, il y a bel et bien une explication rationnelle si Hamid N’gadé dame le pion aux journalistes professionnels. La première raison c’est un truisme de dire que la junte a fini par mettre tout le monde au pas : journalistes, société civile, bref tous les contre-pouvoirs. La junte a domestiqué la presse nigérienne. Elle lui a enlevé sa vocation et sa liberté de ton. Ensuite l’information a disparu pour donner lieu à la propagande et à la manipulation.
En fin, très tôt certains confrères ont cédé aux chants de sirènes pensant que leur heure de gloire à sonner. La presse nationale est subitement devenue inconsistante, tendancieuse ; tant elle est vidée de son âme. L’autocensure et le « lècheculisme » caractérisent aujourd’hui les journaux et les médias sociaux, à l’exception notable du camp des démocrates qui a assumé ses convictions en affichant une opposition absolue à la forfaiture du 26 juillet.
Ceux-là ont averti les Nigériens dès au départ que le coup d’Etat de Tiani n’a rien de révolutionnaire. C’est un complot avec l’unique objectif de déposer le président Bazoum ; advienne que pourra. Dès au départ, ceux-là ont eu l’intime conviction que l’opération de Tiani et ses compagnons d’armes est un péril majeur pour le Niger voire le scénario du pire. Nous ne nous sommes pas trompés.
Les idées dominantes étant celles de la classe dominante, pour paraphraser Marx, l’opinion publique nigérienne subit une sorte de crétinisme ambiant, une posture manichéenne où quelques-uns décident de qui est apatride ou patriote ; de ce qui est « diffusable » et de ce qui ne l’est pas.
Le règne de la pensée unique ou plutôt la dictature de l’opinion s’impose : tu soutiens la junte ou tu es ennemi interne.
Mais sans se décourager, comme des fauves blessés ou des combattants au front, les N’gadé apparaissent comme une source d’information alternative, crédible qui s’impose à tous. Cela s’explique aisément par les professionnels des médias : les sources d’information préfèrent passer leurs scoops là où ils seront portés au public.
De proche en proche, l’équipe de N’gadé s’est imposée comme la défense de la veuve, de l’orphelin et de toutes les personnes vulnérables, la voix des opprimés de ce régime.
C’est pourquoi soldats, syndicalistes, Chômeurs, paysans, commerçants, étudiants, travailleurs et même des serviteurs de la junte au cœur du système considèrent N’gadé comme la véritable « voix des sans voix ».
En un mot comme en cent, le phénomène Hamid N’gadé n’est que la conséquence de la mise au pas des contre-pouvoirs. La réponse à la défaite de la raison au Niger.
Notre pays fait face à une crise politique, au lieu de voir la réalité en face les laudateurs ont poussé les autorités militaires à la faute. Même dépouillé de sa nationalité, N’gadé reste et demeure un activiste très influent au Niger et ailleurs. Il faudrait savoir faire avec…Et c’est tant mieux qu’il y ait dans notre pays encore plus des N’gadé, des Pagoui, des Safia, des Ange Chékaraou Barou, des wilik kader, des Mo Wangaro etc…et même des Bana parce que notre société est plurielle. Et elle a besoin de toutes les voix.
Elh. M. Souleymane
