Le lundi 10 novembre 2025, s’est déroulé à la salle de réunion du Mafé, à Niamey, un atelier d’échange portant sur l’ordonnance n°2011-22 du 23 février 2011 relative à l’accès à l’information publique et aux documents administratifs et l’ordonnance n°2024-28 du 7 juin 2024 modifiant la loi n°2019-33 du 3 juillet 2019 portant répression de la Cybercriminalité. Cette activité s’inscrit dans le cadre du projet ‘’Protection de la sécurité humaine en luttant contre la corruption, l’instabilité et les conflits-Phase ‘’, mis en œuvre par l’ANLC/TI-Niger et Transparency Défense et Sécurité (TI-DS). Aujourd’hui, huit journalistes croupissent en prison du fait de la modification liberticide de la loi portant cybercriminalité en 2024.
Cet atelier a réuni, anciens dirigeants du Conseil Supérieur de la Communication (CSC), journalistes, juristes, acteurs de la société civile et des éléments des forces de défense et sécurité en lien avec le secteur de la communication.
C’est Dr Boubacar Amadou Hassane, juriste constitutionnaliste qui a animé cet atelier en deux temps, avec deux communications : la première sur l’ordonnance portant accès à l’information publique et aux documents administratifs et la seconde sur l’ordonnance portant répression de la cybercriminalité.
Dans sa première communication le conférencier a d’abord rappelé les domaines défendus par la loi comme le secret des délibérations du gouvernement, le secret défense, le crédit public, le secret d’instruction, le secret médical et industriel. Il a également renseigné l’atelier sur la procédure d’accès à l’information publique et les différentes voies de recours en cas d’obstruction à l’exercice de ce droit aux chercheurs, journalistes et le commun des citoyens.
Même si le décret d’application n’est pas encore intervenu, il n’en demeure pas moins que les citoyens peuvent tirer profit de cette loi à l’exception des dispositions des parties qui n’ont pas été précisées par le décret, a fait savoir Dr Amadou Boubacar Hassane. En dépit de certaines insuffisances relevées par les participants, cette loi est un instrument qui peut contribuer à la bonne gouvernance. Au nom de l’intérêt général, les participants ont recommandé la prise en compte de cette ordonnance pour une refondation qui rime avec le progrès.
S’agissant de l’ordonnance n°2024-28 du 7 juin 2024 modifiant la loi n°2019-33 du 3 juillet 2019 portant répression de la Cybercriminalité, le conférencier a mis en évidence qu’elle aggrave les peines lorsqu’il s’agit de diffusion de données de nature à troubler l’ordre public ou à porter atteinte à la dignité humaine. La notion de trouble à l’ordre public est une notion élastique où toutes les interprétations sont possibles.
Dr Amadou Boubacar Hassan a déclaré que cette ordonnance constitue une ‘’négation du pluralisme médiatique, une véritable menace pour l’espace civique’’ où désormais tout le monde est mis au pas. Le constat est clair, les forces vives de la nation sont mises au pas en observant un silence total et subissent toutes les mesures scélérates de la junte par crainte d’emprisonnement. La presse privée est à l’agonie et la société civile a disparu à l’exception de Transparency International-Niger et Alternative espaces citoyens qui tentent de résister, constatent les participants. L’ordonnance portant répression de la cybercriminalité a été rédigée avec un esprit qui n’a pas tenu compte de la nécessité de protéger le droit à l’information en tant que droit fondamental de l’Homme tel que reconnu par la Charte de la refondation. L’intention était clairement de nuire lorsqu’une loi vous condamne à la prison même si ce que vous dites est vrai. Et pire, la loi ne donne aucune possibilité au juge de condamner avec sursis même les délinquants primaires, aucune possibilité d’accorder des circonstances atténuantes à un prévenu. Les participants sont presque unanimes que cette ordonnance constitue une régression pour le pays où le débat public s’appauvrit et la liberté d’expression prend un coup. Les participants ont vivement recommandé un plaidoyer pour convaincre les autorités à respecter la charte de la refondation et par conséquent leurs promesses de respecter les engagements internationaux souscrits par le Niger.
De façon générale, l’on retient des débats qu’on ne saurait refonder un pays en mettant les libertés entre parenthèses. Et d’ailleurs avec des témoignages à l’appui, il est clairement apparu que les journalistes n’ont pas de leçons de patriotisme à recevoir en sens qu’ils prennent des risquent majeurs au nom de l’intérêt général. Par conséquent, empêcher aux journalistes de faire leur travail ou les considérer comme des ‘’ennemis internes’’ est contre-productif. Cela a comme conséquence le développement de la désinformation et le recours aux réseaux sociaux.
Les participants ont insisté sur le fait qu’à l’ère des réseaux sociaux la censure est impossible, il importe de savoir gouverner en tenant compte du contexte. D’ailleurs la loi sur la liberté de la presse au Niger appréciée par tous était acquise sous le régime de la transition de Salou Djibou. Les participent se demandent pourquoi la transition actuelle qui prône la refondation peine à consolider les acquis en matière de régulation de la communication qui font de notre pays une référence en Afrique ?
La rédaction





