Les relations diplomatiques entre le Niger et le Bénin connaissent des péripéties depuis le coup d’État survenu au Niger, le 26 juillet 2023. Les sanctions imposées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont exacerbé les tensions entre les deux pays, révélant des failles diplomatiques. Malgré la levée des sanctions, le Niger a maintenu sa frontière fermée avec le Bénin, plongeant les relations bilatérales dans une profonde crise.
Les retombées de cette décision ont été ressenties des deux côtés de la frontière. Du côté béninois, les autorités ont rapidement réagi en exigeant la réouverture de la frontière, tout en menaçant de bloquer l’exportation du pétrole brut nigérien, qui transitait par le pipeline vers le port de Sèmè Podji. Cette escalade des tensions a conduit le Bénin à mettre en œuvre sa menace, empêchant ainsi l’exportation du brut nigérien.
Face à cette situation de blocage, des figures politiques influentes comme les anciens présidents béninois Nicéphore Soglo et Boni Yayi ont pris l’initiative d’une médiation entre les deux États. Leur intervention a permis d’amorcer le dialogue, culminant avec la reprise de l’exportation du brut nigérien vers le Bénin. Ce dégel a également été marqué par des gestes diplomatiques, comme la présentation, le 6 août 2024, des copies figurées des lettres de créance du nouvel ambassadeur du Bénin au Niger.
La rencontre entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays, en septembre 2024 lors du Forum Chine-Afrique à Beijing, a également favorisé un climat de dialogue. Les discussions ont porté sur la sécurité, un point crucial pour le Niger, qui conditionne l’ouverture de sa frontière à des garanties de sécurité du côté béninois. De leur côté, les autorités béninoises ont promis de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité sur leur territoire.
Cependant, malgré ces avancées encourageantes, l’opinion publique a été surprise de voir le Niger réactiver une note interdisant aux camions immatriculés RB (République du Bénin) de transporter des marchandises à destination du pays. Cette décision soulève de nombreuses questions : pourquoi réactiver une restriction alors que les deux pays semblent s’acheminer vers une normalisation de leurs relations ? Quelle en sera l’impact sur le commerce bilatéral et sur les efforts de réconciliation engagés par les deux parties ? Cette décision n’impacte pas des transporteurs nigériens qui disposeraient des camions immatriculés RB ?
La réactivation de cette interdiction pourrait saper les efforts de rétablissement des relations entre le Niger et le Bénin surtout qu’en marge de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, en cours actuellement à New York, les ministres des Affaires étrangères des deux pays ont prévu de se retrouver à nouveau.
Alors que le Bénin a autorisé la poursuite de l’exportation du brut nigérien, cette nouvelle décision pourrait être perçue comme un retour en arrière. Les acteurs économiques des deux pays risquent de voir leurs perspectives de coopération compromises, alors qu’une dynamique de rapprochement avait été amorcée.
D’un autre côté, cette tension ravivée pourrait également avoir des répercussions sur les discussions en cours entre les ministres des affaires étrangères, qui avaient exprimé leur volonté de relancer la coopération mixte nigéro-béninoise.
En définitive, la diplomatie nigérienne semble prendre un tournant incertain. Pour que la coopération entre le Niger et le Bénin puisse véritablement se rétablir, il est impératif que les décisions politiques soient en adéquation avec les efforts diplomatiques. Sinon, la promesse d’une coopération fructueuse risque de rester lettre morte, laissant place à un climat d’incertitude qui ne profite ni aux citoyens ni aux économies des deux pays.
Mahamadou Tahirou
L’Autre Républicain du jeudi 26 septembre 2024