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14 février, 2025
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Pratiques corruptives au Niger : La réalité trahit les engagements de la junte !

Le Niger, pays riche en ressources naturelles et en potentiel économique, traverse une période tumultueuse depuis le coup d’État qui a renversé le président Mohamed Bazoum, le 26 juillet 2023. Dans sa première adresse à la Nation, le président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le général Abdourahamane Tiani, a justifié cette prise de pouvoir notamment par la nécessité de mettre fin à la mal gouvernance et aux pratiques corruptives qui gangrenaient le pays. Pourtant, un an plus tard, il semble que les promesses de transparence et de bonne gestion ont été rapidement oubliées.

En effet, la junte, loin de se positionner comme un acteur de changement, a adopté des mesures qui soulèvent de vives inquiétudes quant à la gestion des affaires publiques. L’ordonnance 2024-05, adoptée en février 2024, a institué une dérogation aux règles de transparence dans l’attribution des marchés publics. Ce changement législatif est perçu comme un véritable permis de dilapidation de l’argent public.

Ces derniers temps, des journaux privés n’ont eu de cesse de dénoncer des travers dans la gestion des affaires publiques. Ils y ont dénoncé la commande de 3,8 milliards de francs CFA de fournitures scolaires par le Ministère de l’Education nationale, l’achat d’un véhicule à un prix qui donne le tournis par un établissement public, l’achat illégal de médicaments dans un hôpital de Niamey, le recrutement jugé suspect d’agents à la Caisse Autonome des Retraites du Niger (CARENI) où le Président du Conseil d’Administration s’oppose à la Directrice Générale, le limogeage sans autre forme de procès du ministre Moustapha Barké en charge du pétrole et de Habibou Issoufou, directeur de cabinet adjoint du général Tiani, sur fond de suspicions de corruption présumée, etc.  Sur tous ces cas et d’autres enfouis, le gouvernement reste mystérieusement silencieux.

La réaction des autorités face à de telles affaires reste à surveiller, car elle pourrait révéler si la junte est réellement prête à lutter contre ces pratiques ou si elle préfère les ignorer pour ne pas froisser des personnalités qui lui sont proches.

La demande de justice sociale a vécu, comme qui dirait. On se rend à l’évidence que sous le CNSP, des citoyens peuvent perdre collectivement leurs emplois dans l’insouciance totale des gouvernants mais certains proches ou parents des membres de l’establishment sont embauchés ou promus en violation des procédures et règles établies. Le discours faussement révolutionnaire qui a enflammé les laboussanistes semble atteindre ses limites objectives en matière de gouvernance.

Le climat de corruption ambiant a des répercussions directes sur l’économie du pays. Les investisseurs, en quête de transparence et de sécurité juridique, hésitent à s’engager dans un tel environnement. Le manque de confiance envers les institutions et l’opacité dans l’utilisation des fonds publics freinent les investissements privés, indispensables pour le développement du pays. Récemment, des informations ont circulé sur le refus des investisseurs de participer aux émissions de trésor, mettant en lumière un désenchantement croissant vis-à-vis des pratiques en cours.

Le soutien des institutions financières internationales, telles que le FMI et la Banque mondiale, est crucial pour la relance de l’économie nigérienne. Toutefois, il est à craindre que ces organismes ne revoient leur position concernant le déblocage de fonds destinés au Niger, tant que la transparence et la lutte contre la corruption ne seront pas garanties.

Le Niger se trouve à un carrefour critique où les pratiques corruptives tant dénoncées par la junte elle-même, semblent s’être intensifiées au lieu de diminuer. Il est impératif que les acteurs politiques du pays prennent conscience de l’impact destructeur de ces comportements sur la société et l’économie. La transparence, la responsabilité et la bonne gouvernance doivent devenir des priorités absolues pour redresser la situation et restaurer la confiance des citoyens et des investisseurs. Seule une prise de conscience collective et des actions concrètes peuvent espérer redonner au Niger une trajectoire de développement durable et respectueuse des droits de tous.

Mahamadou Tahirou

L’Autre Républicain du jeudi 10 octobre 2024

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