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16 janvier, 2025
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Gouvernance : L’heure de la reddition des comptes

57 milliards de francs CFA. C’est la moisson enregistrée par la Commission de lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale (COLDEFF) à la date du 1er décembre 2024 soit en une année d’exercice.

Cela fait un long moment que l’on n’a pas entendu parler de cette structure créée par le général Tiani pour correspondre au besoin de justice sociale exprimée par de très nombreux Nigériens. Le CNSP l’avait bien compris en faisant de la mauvaise qualité de la gouvernance au Niger le deuxième prétexte pour justifier son intrusion dans la gestion de l’Etat. Il savait que ce thème suffisait à lui seul pour mobiliser des pans entiers de la population qui croyaient dur comme fer que certains pontes du parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS Tarayya) et leurs alliés ont énormément détourné l’argent public. Pour cela, il faut leur faire rendre gorge. L’instrument de répression de cette délinquance était justement la COLDEFF qui a hérité des rapports de la Haute Autorité de Lutte contre la Corruption et les Infractions Assimilées (HALCIA) et des Inspections d’Etat.

A l’épreuve de la réalité, on s’est rendu compte que cette structure a fait comme certaines de ses devancières : beaucoup plus d’effets d’annonces que du concret. Car c’est une tradition bien établie au Niger qu’à chaque coup d’Etat correspond une commission de moralisation ou de lutte contre la délinquance économique avec toujours des résultats mitigés. C’est sans doute le cas de la COLDEFF qui, pour justifier ce que de nombreux Nigériens perçoivent comme des contre-performances, a avancé certaines raisons. Parmi ces raisons, on peut y lire : difficultés rencontrées dans l’exploitation de certains rapports, impossibilité de traiter certains dossiers parce que les mis en cause ont fui le pays pour s’établir à l’extérieur, certains rapports n’étant pas directement exploitables ont nécessité de nouvelles investigations, préjudices financiers très faibles pour certains rapports. Si la COLDEFF a tenu à se justifier, c’est sans doute parce qu’elle est consciente que ses résultats ne sont pas à la hauteur des attentes des populations.

On ne sait pas pourquoi la COLDEFF n’a pas remonté plusieurs années avant l’avènement des gouvernements de la Renaissance. Surtout qu’à l’époque du président Mohamed Bazoum, il a décidé qu’il n’y a plus de prescription en ce qui concerne les détournements des deniers publics. On s’étonne aussi de ce que la COLDEFF s’est contentée d’exploiter des dossiers relatifs à l’exécution des marchés publics entre 2018 et 2022. Pourquoi pas avant ? Ce qui laisse apparaitre aux yeux de l’opinion comme un deux poids deux mesures injustifiable.

Curieusement, on entend la COLDEFF se plaindre de ce que les Nigériens n’apportent pas leur collaboration en dénonçant des actes de détournement des deniers publics. Comment lutter contre la corruption alors que sous le magistère du CNSP une ordonnance a été signée, le 23 février 2024, portant dérogation à la législation relative aux marchés publics, aux impôts, taxes et redevances et à la comptabilité publique de la Présidence ainsi que de la défense et de la sécurité ?

Au nom de la transparence, peut-on savoir ce qui a été fait avec l’argent ainsi recouvré ? Quelle est la part perçue par les membres de la COLDEFF sous forme de ristournes ?

Des niches

Les sources pour faire rentrer de l’argent frais dans les caisses de l’Etat sont nombreuses. Force est malheureusement de constater que les Nigériens ne sont pas bien édifiés sur l’utilisation qui en est réellement faite. Les chargements des navires pour évacuer le pétrole brut nigérien se poursuivent à partir du port de Semé Podjé, au Bénin. A cette date, nous sommes à combien de chargements ? Combien ces chargements ont-ils rapporté au trésor nigérien ?

Il en est de même du Fonds de Solidarité pour la Sauvegarde de la Patrie (FSSP) avec ses très nombreuses niches. Invitée de Télé Sahel, il y a quelques mois à l’occasion du 1er anniversaire de la création du FSSP, la présidente dudit Fonds avait annoncé une réflexion en cours pour identifier d’autres niches porteuses. Pour cela, elle entendait rencontrer les syndicats des travailleurs. Presque chaque jour, sur Télé Sahel, on annonce l’argent collecté mais c’est le silence radio sur les dépenses qui sont exécutées. Et par qui ? Sur quelle base ? Car, en principe, celui qui collecte ne doit pas être la personne qui exécute les dépenses.

Et puis, il y a le téléthon qui a mobilisé près de deux milliards FCFA en faveur de la lutte contre les décès maternels et périnatals évitables dont la clôture interviendra le 15 janvier 2025. Quel est le plan d’utilisation des ressources ainsi collectées ?

Les autorités qui demandent plus de résilience de la population doivent être inspirées en jouant les règles de transparence dans la collecte et la gestion des ressources financières. Au nom de la bonne gouvernance, un des prétextes qui a conduit au coup d’Etat du 26 juillet 2023. Le CNSP est face à ses engagements : les Nigériens attendent que les comptes leur soient rendus.

La rédaction

L’Autre Républicain du jeudi 9 janvier 2025

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