Comme à l’école primaire où l’enseignant demande aux élèves de sa classe de passer un à un pour réciter la leçon du jour, les ministres du général Tiani se succèdent sur le plateau de Télé Sahel pour dresser le bilan des lettres de mission qu’il leur a confiées.
La transition, qui avait été présentée comme une promesse de stabilité, de réformes et de progrès, fait aujourd’hui face à des critiques croissantes sur l’efficacité des actions entreprises. Les promesses de changement semblent se heurter à une réalité qui peine à répondre aux attentes. Dans ce contexte, la question qui se pose est de savoir si les lettres de mission attribuées aux ministres, en début année 2024, ont réellement permis d’atteindre les objectifs assignés. La reddition des comptes lancée sur Télé Sahel à la demande du président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) offre une plateforme pour que chaque ministre puisse rendre compte de ses actions.
Mais peut-on véritablement y voir une évaluation rigoureuse et objective des performances gouvernementales ? À première vue, l’exercice de reddition de comptes semble être une démarche bienvenue, une opportunité pour chaque ministre de présenter son bilan et de se justifier de ses actions. Cependant, après avoir suivi les interventions de certains ministres, il devient évident que l’approche adoptée ne répond pas véritablement à une logique d’évaluation rigoureuse. En effet, au lieu de se concentrer sur des indicateurs clairs, mesurables et tangibles, les discours semblent davantage être des récits relatant des actions entreprises sans fournir les éléments permettant d’évaluer leur réelle efficacité. Dans cette optique, l’exercice semble plus proche d’une simple présentation de faits que d’une véritable évaluation de la performance gouvernementale.
L’évaluation des ministres ne peut se contenter d’une énumération des actions entreprises, ni d’un récit global des projets initiés. Elle doit se fonder sur des indicateurs concrets, permettant de mesurer l’impact réel des réformes sur la vie quotidienne des Nigériens.
Le discours de certains ministres se limite souvent à une énumération des actions entreprises et des intentions affichées, sans fournir des données tangibles permettant de juger de la réussite ou de l’échec de ces initiatives. Les ministres parlent de réformes entreprises ou de changements en cours, mais ces affirmations ne sont pas accompagnées d’indicateurs permettant de mesurer l’efficacité de ces réformes.
Un autre aspect important de l’évaluation des performances gouvernementales concerne l’impact des réformes sur les citoyens. Les Nigériens, en particulier les populations vulnérables, sont les premiers à ressentir les effets des politiques publiques. Il est donc essentiel que l’évaluation prenne en compte des critères de satisfaction de la population. Les ministres devraient être en mesure de démontrer, à travers des enquêtes de terrain ou des indicateurs socio-économiques, l’impact concret de leurs actions sur la vie quotidienne des citoyens. Ont-ils réellement contribué à améliorer l’accès à l’éducation, à la santé ou à l’emploi ? L’économie s’est-elle réellement redressée ? Les préoccupations majeures de la population, telles que la sécurité ou la justice sociale ont-elles été prises en compte de manière efficace ?
Cependant, cette évaluation ne doit pas se limiter à un jugement d’apparence sur la satisfaction populaire, mais doit aussi permettre de détecter les points de friction et les obstacles rencontrés. Une telle approche permettrait non seulement de dresser un bilan plus équilibré et réaliste, mais aussi de poser les bases d’une amélioration continue de la gestion publique.
L’exercice de reddition de comptes ne doit pas être perçu comme un simple exercice de communication, mais comme un véritable moment de bilan, permettant d’ajuster le cap de la transition. Si cette démarche est conduite avec transparence, rigueur et objectivité, elle pourra véritablement contribuer à la transformation du Niger.
Mahamadou Tahirou
L’Autre Républicain du jeudi 6 Février 2025