Le Premier ministre Ali Mahamane Lamine Zeine est arrivé à Moscou, lundi 15 janvier, pour une visite de travail dont l’objectif est de renforcer la coopération bilatérale russo-nigérienne dans les domaines militaire, économique et commercial. Zeine a mis les petits plats dans les grands en embarquant avec lui les ministres de la Défense, des Sports, des Affaires étrangères du Pétrole, du Commerce et le Chef d’Etat-major Particulier du chef de l’Etat, apprend-on.
Sur le plan militaire, les deux pays ont « convenu d’intensifier les actions communes pour stabiliser la situation » et « accroitre l’aptitude au combat des Forces armées ». Le ministre de la Défense, le général Salifou Mody, a annoncé la finalisation des projets dont les discussions ont démarré à Niamey, et que bientôt les activités de renforcement des capacités des Forces nigériennes vont commencer.
A bien comprendre, la Russie va aider le Niger à stabiliser la situation sécuritaire. Est-ce à dire que la milice Wagner déposera enfin ses valises dans notre pays ? Rien n’est exclu d’autant qu’en décembre dernier le Vice-ministre russe de la Défense était à Niamey, après Bamako et Ouagadougou, où il a paraphé un document avec le ministre nigérien de la Défense, dont les termes sont tenus secrets à cette date. Le général Mody est présenté comme la porte d’entrée de la nouvelle coopération militaire russe au Niger.
Les domaines de l’énergie et de l’agriculture ont été aussi à l’ordre du jour. « La Russie considère le Niger comme un pays ami et entend resserrer les liens économiques et les échanges commerciaux avec ce pays », a précisé le Vice-Premier ministre russe. Le Niger a-t-il sollicité du blé et de l’engrais russes ? Possible. Les Nigériens attendent de savoir exactement de quoi il a été question à Moscou et les retombées d’un si long déplacement.
A entendre certains commentaires, on a l’impression que la coopération entre le Niger et la Russie vient à peine de voir le jour. A la vérité, c’est une coopération ancienne qui date d’au moins un demi-siècle. Le Niger et l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) avaient entretenu des relations diplomatiques, avec ouverture des Ambassades. Le gouvernement soviétique offrait des bourses de formation aux jeunes nigériens, dans les domaines des sciences, de l’agriculture, de l’énergie, entre autres. Avec la dislocation de l’URSS, cette coopération a eu du plomb dans l’aile. Mais pour autant, les relations diplomatiques n’ont jamais été rompues. Avec la Russie, cette coopération s’est poursuivie.
Sous le règne du président Mohamed Bazoum, la coopération entre le Niger et la Russie était au beau fixe notamment dans le domaine militaire. On se rappelle que le Niger achetait des équipements russes notamment sa flotte aérienne, et formait les personnels de son armée de l’air chez Poutine. A l’époque du président Bazoum, le Niger n’achetait pratiquement pas de matériels militaires aux Etats-Unis ou en France mais en Russie, en Turquie, etc. Avant l’arrivée du président Bazoum au pouvoir, les ministres de la Défense Kalla Moutari et Issoufou Katambé avaient effectué des missions en Russie ; le premier avait même signé une convention de partenariat entre les gouvernements russe et nigérien. Il n’y a donc rien de révolutionnaire qu’une mission du CNSP et de son gouvernement se rende à Moscou ; les néo populistes et souverainistes nigériens laissant croire que cela est inédit.
Par contre, ce qui peut être considéré comme inédit, c’est le fait que le Premier ministre Lamine Zeine et le ministre d’Etat, ministre de la Défense nationale, le général Mody, soient reçus que par le Vice-Premier ministre et le Vice-ministre de la Défense. En fait, les seconds couteaux. Certains analystes y ont perçu un manque d’égards vis-à-vis de la délégation nigérienne qui a fait le trajet sur plusieurs milliers de kilomètres pour densifier la coopération bilatérale.
Il se peut que cette mission ait été obtenue au forceps, au terme d’un forcing diplomatique. L’essentiel est de se rendre à Moscou pour montrer aux Occidentaux que le Niger compte sur la scène internationale malgré le coup d’Etat. Dans tous les cas, il s’agit d’un jeu d’intérêts car la Russie s’active à prendre pied en Afrique. Dans le cas du Niger, même si la Russie s’est opposée à toute intervention militaire de la CEDEAO, elle avait appelé à la libération du président Mohamed Bazoum et soutenu le retour à l’ordre constitutionnel dans notre pays. Ce qui constitue un revers pour ceux qui se murent dans une posture non-dialogique alors que le pays est dans l’abime depuis les évènements du 26 juillet 2023.
La rédaction