Hier, jeudi 7 mars 2024, une conférence débat a été organisée à l’Espace Frantz Fanon d’Alternative Espace Citoyen sous le thème : « Place et rôle des médias dans un contexte d’exception ». Cette conférence a été animée par Dr Souley Adji (socio politologue), Boubacar Diallo (Journaliste) et Albert Chaibou comme modérateur. C’était un échange interactif où conférenciers et participants ont tiré la sonnette d’alarme et quelques leçons pour que les journalistes assument véritablement leur rôle de veille et d’historiens du présent.
Avant de donner la parole aux conférenciers, Albert Chaibou a bien voulu brosser un bref aperçu historique de la presse au Niger depuis le Temps du Niger (ancêtre du Sahel) jusqu’au coup d’Etat du 26 juillet dernier. Il avait mis en évidence le rôle bien assumé par les journalistes et les intellectuels comme Souley Adji et feu Abdoulaye Souley Niandou dans un autre contexte d’état d’exception. Albert Chaibou a rappelé le mérite des ainés qui ont su être dignes face aux inquisiteurs et la pensée unique pour le triomphe des acquis démocratiques. Dans le contexte actuel, « la majorité des confrères font la part belle à la junte dans le traitement de l’information en mettant l’accent sur l’information patriotique », a fait observer Albert Chaibou.
Ce constat a été conforté par les deux communicateurs. Dr Souley Adji dira que « le traitement de l’information est labousaniste caractérisé par le monopole des médias d’Etat dans un contexte délétère avec des dirigeants qui n’en font qu’à leurs têtes ». Et Dr S. Souley, en grand témoin de l’histoire, d’interpeller les confrères présents en ces termes : « la situation actuelle n’est qu’un intermède, ce n’est pas la fin de l’histoire ».
Notre confrère Boubacar Diallo s’indigne également : « la grande majorité fait la part belle à la junte sans respect de la charte du journaliste professionnel » avant de se demander si ce déséquilibre dans le traitement de l’information par les journalistes est délibéré ou non. Mais Boubacar Diallo est un peu plus nuancé en considérant que de tous les régimes d’exception connus par notre pays, celui de Tiani serait ‘’le plus souple’’ à l’endroit des journalistes.
Dr Souley Adji de rétorquer que même le régime du général Baré était en bons termes avec les médias à ses débuts. « C’est dès lors que le général Baré a annoncé son intention d’être candidat aux élections que ses rapports avec les médias étaient gâtés ». C’est dire qu’il ne faudrait pas aller vite en besogne tant que le général Tiani ne décide pas autrement. Et c’est justement pourquoi Dr Souley Adji fait un appel à la vigilance aux journalistes : « Il faut que les médias jouent leur rôle de chiens de garde, de témoins de l’histoire pour que cela serve de mémoire au peuple ». Il rappelle ainsi le mérite de la presse en Chili dont les archives ont permis de juger des dictateurs comme Pinochet.
Un débat fructueux s’en est suivi où les participants ont fait des contributions essentielles en dénonçant la démission des contre-pouvoirs, l’autocensure et le zèle de certains journalistes du public comme du privé à pourfendre la démocratie et les libertés acquises de haute lutte par le peuple nigérien. Et dans ce sens un participant a fait observer ‘’une grave régression par rapport à la pensée politique acquise par les Nigériens sur fond de menace aux libertés fondamentales et la montée de l’intolérance dans notre pays ».
EMS