Le Premier Ministre Ali Mahaman Lamine Zeine, a animé ce samedi 13 juillet 2024, un point de presse. Il s’agit de présenter les quatre axes stratégiques de la vision du Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le général Abdourahamane Tiani. A l’analyse, cet exercice est apparu comme un triste témoignage de l’échec et de l’incompétence qui règnent depuis l’avènement de la transition militaire au Niger.
Les quatre axes se rapportent au renforcement de la sécurité et de la cohésion sociale, à la promotion de la bonne gouvernance, au développement des bases de production pour la souveraineté économique et à l’accélération des réformes sociales.
En ce qui concerne le renforcement de la sécurité et de la cohésion sociale, il est indéniable que la situation sécuritaire du pays s’est gravement détériorée sous le régime du CNSP. Les Nigériens vivent dans la peur, l’insécurité et l’instabilité, sans perspective d’amélioration. De plus, la cohésion sociale, pilier essentiel du vivre-ensemble, est mise à mal. Les divisions et les tensions sont palpables dans tous les domaines de la vie sociale, l’intolérance s’est développée de manière manichéenne entre « patriotes » qui soutiennent la junte, et « apatrides » qui se battent pour la démocratie et l’ordre constitutionnel. Les discours qui stigmatisent prennent toute une autre tonalité mettant en danger la cohésion sociale. Qu’a-t-on fait pour rapprocher les communautés, à l’image du processus engagé par le ministre de l’Intérieur du gouvernement Bazoum, Hamadou Adamou Souley, qui a supervisé personnellement des forums qui ont abouti à des accords de paix entre communautés qui ont passé de très longues années en conflit ?
Pour Zeine, cet axe va leur permettre de rassembler les nigériens autour d’un idéal commun d’appartenance à un même pays et faire face à la menace terroriste. Ce n’est qu’un discours de vœux pieux. Cela ne suffit pas.
Deuxièmement, la promotion de la bonne gouvernance, annoncée comme un axe stratégique, est en réalité une mascarade. L’exemple de l’ordonnance 2024-05 promulguée par les militaires suffit à lui seul pour voir que ce texte n’est rien d’autre qu’un permis de dilapidation des deniers publics, sans aucune sanction ni contrôle. La transparence et l’intégrité sont des concepts étrangers à ce régime qui s’enfonce toujours plus dans l’opacité.
La bonne gouvernance, c’est aussi le respect des lois, le respect postes/emplois, la bonne utilisation de l’argent public, des investissements rationnels, le refus de l’exclusion des citoyens en raison de leurs convictions politiques, etc. Avec la junte, rien de cela n’est rigoureusement observé.
Troisièmement, le développement des bases de production pour la souveraineté économique est un leurre. Le secteur privé est durement éprouvé. La fermeture de certaines entreprises et la stagnation de l’activité économique sont le reflet d’une gestion incompétente. Bien d’entreprises ont réduit leur personnel pour raisons économiques, d’autres ont mis la clé sous la porte. Les activités sont au ralenti. La frontière avec le Bénin reste fermée malgré les appels pressants et incessants des acteurs économiques, plongeant le pays dans une véritable crise économique marquée par la cherté de la vie, la perte des revenus pour les commerçants et celle d’emplois. Qu’a-t-on fait pour créer des entreprises, appuyer les producteurs ruraux (l’engrais et les aliments bétail sont-ils en place ?, etc.
Enfin, l’accélération des réformes sociales n’est qu’un slogan vide de sens. Les militaires ont préféré démanteler l’administration compétente au profit d’une clientèle populiste, sapant ainsi toute tentative de réforme sérieuse. Les véritables acteurs du changement sont mis de côté, laissant le pays dans l’immobilisme et l’injustice.
Ce point de presse du Premier Ministre du Niger est donc un aveu d’échec flagrant. Aucun des objectifs fixés par le CNSP n’a été atteint ; bien au contraire, le pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans la désolation.
Pour le Premier ministre, les actions de la transition seront menées sur la base de cette vision. Jusque-là, pendant toute année, les actions de la transition ont été menées sur quelle base alors ? Cela veut dire tout simplement que tout ce qui a été fait par la junte jusqu’ici n’est fondé sur aucune vison. Sans vision, c’est le règne de l’informel.
« La satisfaction des besoins fondamentaux des populations est le pivot de cette vision du général Tiani », ajoute Ali Mahaman Lamine Zeine. Les besoins fondamentaux des nigériens, c’est la sécurité, la démocratie, l’accès aux soins de santé, à l’éducation y compris pour les filles et les enfants vivant en zones rurales, l’accès aux produits de première nécessité à faible coût, l’emploi pour les jeunes et les moins, la promotion des activités économiques et des investissements pour créer la richesse, etc. A cette date, faites le bilan de la satisfaction de ces besoins, et vous verrez que la junte n’a pas une vision claire de ce qu’il faut faire pour le pays.
Mahamadou Tahirou