Depuis le coup d’Etat du 26 juillet 2023, plusieurs personnalités ayant servi sous la mandature du président Mohamed Bazoum sont privés de liberté et gardent prison à Kollo, Say, Filingué, Birni N’gaouré, Ouallam, Koutoukalé et Niamey. De bonnes sources, on apprend que le juge d’instruction en charge de leur dossier a procédé à leur audition. Presque tous sont poursuivis pour atteinte à la sûreté et complot contre l’Etat. Comment ce chef d’accusation peut-il tenir la route lorsque certains des prévenus ont été arrêtés au même moment que le président Bazoum ? Beaucoup se demandent pourquoi ces personnalités continuent toujours de garder prison ?
Contacté par nos soins, un juriste qui a requis l’anonymat a fait le décryptage suivant : « Sauf que toute l’affaire repose sur un papier non authentifié et une supposée action qui n’a pas connu de début d’exécution. Et cela non pas parce qu’elle aurait été empêchée ou même éventée. Les présumés auteurs ou co-auteurs n’ont pas mis leur supposé plan en exécution. Et personne ne les en a empêché. Où est donc le crime pour lequel on poursuivrait même les militaires incriminés ? Y avoir pensé et y avoir renoncé de leur propre chef ? Encore qu’il faudrait prouver que le papier est authentique ! »
Poursuivant dans la même logique, notre interlocuteur indique : « Aussi, quand même cette tentative aurait été enclenchée, n’est-ce pas de la manifestation d’une loyauté effective de militaires républicains ? Leur résistance aurait été louable et légale. Ils avaient cette mission. L’action des illégaux réussie, ceux qui auront tenté de résister peuvent être neutralisés (arrêtés) le temps que le processus soit irréversible ou le temps qu’ils se soumettent à la nouvelle autorité. Cela se comprendrait. Mais ceux qui sont restés loyaux aux institutions de la République qu’ils sont censés protéger ne sauraient être des traîtres ».
Dans cet imbroglio, rappelons que le ministre de l’Intérieur Hamadou Adamou Souley a été arrêté au moment même où le coup d’état se déclenchait. Il en est de même presque des autres, dont certains ne savaient même pas de quoi il s’agissait. C’est le cas des ministres des Finances, du Plan, du Pétrole, du député Kalla Moutari, et de l’assistant de la 1ère dame Khadidja Bazoum.
Quant à Foumakoye Gado, président du PNDS, garde prison à Niamey. Homme pondéré, certes Haut Représentant du président de la République Mohamed Bazoum, il n’en demeure pas moins un inconditionnel de l’ex président Issoufou Mahamadou. D’aucuns diraient même homme lige de Zaki. Il n’entreprendrait rien qui n’aurait pas la caution de son ami Issoufou Mahamadou. A l’interne du PNDS, Foumakoye était contre l’intervention militaire projetée par la CEDEAO. Comble d’ironie que de le poursuivre pour le même projet. On sait qu’il a dirigé la réunion du présidium de son parti et la déclaration de la mouvance présidentielle l’après midi du coup d’Etat. Qui s’étonnerait d’une telle action de la part du président du principal parti du pouvoir renversé ? On se demandera avec raison si ces arrestations au sein du seul PNDS ne participeraient pas d’une intimidation plutôt qu’autre chose, tant elles n’obéissent à aucune logique.
Toutes ces personnalités ont été déjà auditionnées par le juge d’instruction qui les a déposés dans différentes maisons d’arrêt du pays. Leurs demandes de mise en liberté provisoire n’avaient pas prospéré. Ces personnalités doivent prendre leur mal en patience en attendant le bon vouloir de la junte. Ce qui conforte la thèse du bouclier humain que constitueraient ces personnalités détenues.
Au regard du déroulé du procès de la tentative de coup d’Etat du 31 mars 2021 au même tribunal militaire, il est fort à parier que ce dossier qui serait vide, selon un jurisconsulte, ne saurait prospérer. Nul doute que le juge d’instruction tirera les conséquences sur la base des faits en sa possession et ses échanges avec les prévenus.
La Rédaction
L’Autre Républicain du jeudi 6 juin 2024