Pour la première fois, depuis le coup d’Etat du 26 juillet 2023, les ambassadeurs des pays membres de l’Union européenne (UE) ont rencontré le ministre des Affaires étrangères de la junte, Bakary Yaou Sangaré, la semaine dernière.
Derrière l’optimisme affiché par certains milieux proches de la junte se cache pourtant une toute autre réalité. Cette rencontre n’était pas l’amorce de la normalisation des relations entre l’UE et le Niger. Elle n’était pas aussi un pas important dans le cadre du dialogue politique entre les deux parties. Si les ambassadeurs de l’UE ont cherché à prendre langue avec les autorités de la junte, c’est surtout pour partager avec elles leurs préoccupations, presque un an après la remise en cause de l’ordre constitutionnel au Niger avec le renversement du président démocratiquement élu, Mohamed Bazoum.
Une de leurs préoccupations serait liée à la levée de l’immunité du président Bazoum par la Cour d’Etat, dans un contexte où les principes élémentaires du respect du droit de la défense et de la présomption d’innocence n’ont pas été observés. Ses avocats n’ont pas eu accès à lui tout comme il leur a été refusé le dossier dans lequel sont contenus les chefs d’accusation portés contre lui par la junte.
Manifestement, les droits qui doivent être reconnus à toute personne humaine ont été refusés au président Bazoum. On comprend alors pourquoi, la libération du président Bazoum est un élément qui est sur la balance pour toute normalisation entre l’UE et le Niger. Ce n’est donc pas trop demandé à la junte que de lui rappeler ses engagements à faire droit aux prescriptions des différents instruments internationaux et régionaux en matière des droits humains qu’elle a pourtant annoncé vouloir respecter.
Pour rappel, au lendemain du coup d’Etat du 26 juillet, l’UE l’avait condamné avec fermeté. Dans la foulée, elle avait suspendu sa coopération financière et sécuritaire mais maintenu le volet humanitaire. Elle avait aussi appelé à ce que la sécurité et la liberté de mouvement du président Mohamed Bazoum soient assurées sans conditions.
Le 25 octobre 2023, le Conseil de l’UE avait annoncé des mesures restrictives contre les acteurs de la junte comme le gel de leurs avoirs, l’interdiction de mettre des fonds à disposition des particuliers et des institutions qui sont acteurs de la transition et l’interdiction de voyager pour les membres du CNSP et du gouvernement. Ce, pour avoir menacé la paix, la stabilité et la sécurité du Niger, en portant atteinte à l’ordre constitutionnel, à la démocratie, à l’Etat de droit et aux droits humains…
En son temps, Joseph Borrell, chef de la diplomatie de l’UE, a indiqué que celle-ci ne reconnaissait pas les autorités issues du putsch.
Par la suite, se rappelle-t-on, la junte avait décidé de dénoncer les accords qui mettaient en place Eucap Sahel Niger, et exigé le départ de l’ambassadeur de France. La mission Eucap Sahel devait finaliser son départ du Niger, en juin dernier.
La rédaction
L’Autre Républicain du jeudi 4 juillet 2024