27.2 C
Niamey
6 décembre, 2024
spot_img

Conférence internationale de solidarité avec les pays du Sahel : Vers une véritable unité ou une rhétorique creuse ?

Du 19 au 21 novembre 2024, Niamey accueille une conférence internationale sous le thème « Pour l’unité anti-impérialiste, la paix et l’amitié avec les peuples ». Cet événement, dont l’ouverture a été présidée par le Premier ministre Ali Mahaman Lamine Zeine, aspire à rassembler des voix pour une cause qui semble à la fois urgente et pertinente dans le contexte géopolitique actuel. Cependant, à l’aune des discours enflammés et des promesses d’action, il est légitime de se demander si cette rencontre pourra réellement engendrer les effets escomptés.

La cérémonie d’ouverture, riche en symboles, a vu la participation d’un large éventail d’acteurs, allant des membres du gouvernement aux représentants de la société civile en passant par des diplomates. Le cadre s’est voulu inclusif, comme en témoignent les différentes interventions qui ont ponctué l’événement, allant de la prière à des performances artistiques. Cela dit, cette atmosphère festive et solennelle pourrait-elle masquer un manque de substance et de risques de « sloganisation » excessive ?

Les discours prononcés ont résonné avec des termes tels que « révolution », « souveraineté » et « africanisme », suscitant une ferveur indéniable parmi les participants. Toutefois, cette exaltation soulève des questions : sont-ils réellement en phase avec les véritables problématiques auxquelles le Sahel est confronté, telles que l’insécurité, la pauvreté, l’émigration, la remise en cause de l’ordre démocratique, etc ? Les revendications de souveraineté s’attaquent-elles à ces questions fondamentales et urgentes, ou s’érigent-elles en un discours qui, bien qu’enflammé, reste déconnecté des réalités du terrain ?

Abdourahamane Oumarou, représentant des Urgences Panafricanistes, a eu des mots puissants qui ont su captiver son audience, évoquant le panache des luttes révolutionnaires passées. Cependant, à quoi bon célébrer ces luttes si les véritables défis contemporains ne sont pas abordés de manière concrète ? Le président du comité d’organisation, Maman Sani Adamou, a évoqué l’évolution géopolitique depuis 1989, mais comment cette dynamique historique peut-elle véritablement nourrir une action synergique actuelle face aux crises multicouches qui affectent la région ?

Le Premier ministre, tout en rappelant les sanctions et embargos imposés par la CEDEAO, a clamé le besoin de retrouver une certaine paix et de décider de la souveraineté nationale. Ce discours militant peut sembler légitime, mais une telle rhétorique exige aussi d’être confrontée à des réalités qu’il serait imprudent d’ignorer. La perception d’un ennemi externe, que représentent les sanctions, peut parfois masquer une introspection nécessaire sur la gouvernance interne et les politiques locales.

Les panels de discussion qui ont suivi, bien que prometteurs en termes d’interaction entre les participants, doivent maintenant prouver leur efficacité par des résultats tangibles. Les mots d’ordre doivent être accompagnés d’objectifs clairs et mesurables, sans quoi la conférence risque de sombrer dans l’oubli, laissant derrière elle des espoirs déçus au milieu de défis en constante évolution.

L’un des enjeux majeurs réside dans la question de la légitimité de cette conférence : s’agit-il d’un véritable mouvement de solidarité ou d’un simple rassemblement pour renforcer des visions idéologiques parfois éloignées des réalités ? La mise en œuvre effective des discussions et des résolutions issues de cet événement sera le véritable test de sa pertinence. Les retombées doivent impérativement dépasser le cadre des discours.

La conférence de Niamey incarne un moment clé pour le Sahel, mais elle doit faire face à l’exigence d’une action réfléchie et pragmatique. Pour être utile, elle doit se traduire en initiatives qui répondent aux besoins urgents de la population et assurent le développement durable de la région. Ainsi, l’appel à l’unité et à l’amitié doit se conjuguer avec des éléments concrets pour éclairer un avenir incertain mais porteur d’espoir. Dans ce monde globalisé, en perpétuelle mutation, les attentes sont grandes et les défis encore plus immenses.

Mahamadou Tahirou

L’Autre Républicain du jeudi 21 novembre 2024

Related Articles

Stay Connected

0FansJ'aime
3,912SuiveursSuivre
0AbonnésS'abonner
- Advertisement -spot_img

Derniers Articles