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14 février, 2025
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Politique : Des contre-vérités sur le PNDS-Tarayya

Dans deux tribunes dédiées à l’ancien président Issoufou Mahamadou signées par un certain MKL et partagées par l’ex député Abdoul Moumoune Ghousmane, il y avait une volonté manifeste de travestir l’histoire du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS Tarayya) notamment celle de ses leaders. Tout se ramène à Issoufou Mahamadou et au groupe de 80 dont il était le porte-voix. Les communicants de l’ancien président feignent d’ignorer que beaucoup d’acteurs de cette glorieuse histoire sont vivants. Nous comprenons cette façon de ramener tout à soi qui constitue l’ADN de leur mentor. Or, les faits sont têtus, dit-on. C’est pourquoi, certains grands témoins de l’histoire du PNDS-Tarayya ont accepté de renseigner cette mise au point.

Dans la première tribune intitulée ‘’Issoufou Mahamadou : l’homme derrière l’Histoire politique contemporaine du Niger’’ on peut lire : « La question de la trahison plane notamment sur sa relation avec Mohamed Bazoum, son ancien allié et successeur à la présidence. Certains estiment qu’en soutenant Bazoum, Issoufou a compromis l’unité et l’héritage du PNDS-Tarayya… »

Dans la seconde tribune, on peut y lire : ‘’Plus de 30 ans d’organisation de complots contre la personne de Issoufou Mahamadou et le parti PNDS Tarayya’’, l’auteur écrit : « C’est lui (NDLR : Issoufou Mahamadou) qui parcourait des kilomètres en voiture pour venir aux réunions du groupe 80. Vous n’avez aucune idée de la souffrance des leaders comme Souleymane Kané, Foumakoye Gado ou encore Kalla Hankourao pour mettre en place ce projet. Aujourd’hui, le coup d’Etat contre le groupe de 83 démontre une insuffisance que les leaders du groupe n’ont peut-être pas comprise : la notion de stabilité ».

Le lecteur attentif a bien saisi que le coup d’Etat a été ourdi et exécuté contre le groupe de 83, le groupe de Mohamed Bazoum s’entend. C’est gênant que ceux qui pensent parler au nom d’Issoufou Mahamadou ressassent de telles absurdités en pensant le servir de cette façon. Quelle belle manière de dire aux Nigériens que le coup d’Etat du 26 juillet 2023 est avant tout une affaire du PNDS pour sévir contre une catégorie de ses propres militants !

On peut tout de suite rétorquer que dans la formation et l’implantation du PNDS, les sacrifices des camarades du Syndicat national des enseignants du Niger (SNEN) et de l’Union des syndicats des travailleurs du Niger (USTN) ont été décisifs. Ce qui est, du reste, l’apanage du fameux groupe dit de 83 dirigé par l’enseignant et syndicaliste Mohamed Bazoum.

Partout, n’en déplaise à ceux qui voudraient sciemment travestir cette histoire, c’étaient des enseignants militants et dirigeants syndicaux qui étaient des pionniers dans l’implantation du parti. Ceux-là ont bravé intempéries et privations pour l’enracinement de cette association politique qui est l’émanation des camarades même si la majorité est passée dans l’anonymat. Mais pour l’histoire, on ne peut pas parler du PNDS-Tarayya sans ces pionniers qui n’ont été guidés que par leur engagement militant au service de leur pays.

Dans une vidéo qui remonte au 5 avril 2023 (donc longtemps avant le dernier Congrès du PNDS tenu en décembre 2023), partagée récemment sur Facebook, l’on a entendu Monsieur Kalla Moutari, un des membres fondateurs du parti, dire clairement : « Je ne connaissais pas Issoufou. C’est Bazoum qui m’avait dit qu’Issoufou Mahamadou et Massoudou passeront prendre contact avec moi. Et on venait ensemble à Niamey (eux venant d’Arlit, moi de Tahoua) pour prendre les contacts nécessaires et préparer les documents nécessaires à la création du parti ».

Cette vidéo de Kalla Moutari est surtout un témoignage éloquent suite aux allégations tendant à dire que Bazoum n’avait pas gagné les élections et qu’il aurait été imposé par Issoufou Mahamadou. Les observateurs se demandent toujours sur les raisons de l’arrestation du député Kalla Moutari aux premières heures du putsch du général Tiani.

Bazoum a été décisif dans l’implantation et l’essor du PNDS

Dans le processus de la création du PNDS-Tarayya, le groupe de 83 n’était pas une lubie. C’est réel. Il y avait feu Almou Oumarou à Tillabéri, Amadou Alkali à Tahoua, Bazoum lui-même était à Maradi à la création du parti, Hamadou Adamou Souley et Inoussa Oumarou (SNEN) étaient à Zinder. A Dosso, Agadez et Diffa, c’était partout des camarades du SNEN et de l’USTN qui ont créé les premières cellules du parti. Ceux qui n’étaient pas à cette phase et qui ne seront pas formés ou informés à la source ne sauraient connaître cette histoire dont Bazoum incarnait le leadership.

C’est vérifiable, toutes les cellules par lesquelles les cadres étaient passés pour créer et implanter le PNDS étaient soit du groupe de 1983 si elles ne sont pas purement et simplement syndicales, toujours sous le leadership de Bazoum et ses amis en ville comme en campagne, jusqu’aux fins fonds du monde rural où vivent des enseignants et des fonctionnaires syndiqués. D’ailleurs, c’est la base sociale du PNDS à sa création qui explique largement son implantation plus forte, presque exclusivement rurale et des petites bourgades. Dans les grandes villes, l’implantation du PNDS reste dans les mêmes milieux syndicaux et des travailleurs. Pour l’essentiel, les 13 membres du groupe 80 sont à Niamey, en particulier à l’Université, certains presque coupés de leurs bases. Même à Tahoua, le PNDS était resté dans ce milieu modeste, aucun cadre de haute sphère n’était PNDS. Ils étaient y compris les commerçants, MNSD-Nassara ou CDS-Rahama. Ceci explique d’ailleurs le fait que Issoufou Mahamadou soit presque toujours seul à faire le déplacement de l’intérieur à partir de Niamey (hormis Barbizo, Adolphe Sagbo, Assoumana Hassane qui se faisaient plus disponibles). C’est sur place que l’équipe de mission est constituée.

Bazoum passait presque pour quelqu’un de Maradi. Aujourd’hui, tous les vieux de Maradi, premiers militants du PNDS, sont décédés. Ils passaient pour les pères de Bazoum : Malan Ali, Alassane Yarima, Dogon Kané, Elhadji Gandi, Hadjia Hadiza, Nazouma père et fils, etc. Ses amis étaient les Dr Kelessi, Moudi Dankorao, Issa Moussa, Idder Mahamadou,  Issaka Ali, etc, apprend-on.

Bazoum n’était pas d’une région. Il était national dès le commencement. Il est un camarade pour ses vrais amis, pas un arabe, un reproche que lui faisaient certains membres du présidium du parti qui n’acceptaient pas sa position de 2ème personnalité du parti.

Un problème qui avait commencé le jour de la mise en place du bureau provisoire. Issoufou Mahamadou devait être élu Secrétaire général à l’unanimité. Il le fut. Mais quand vint le tour de Bazoum pour être élu comme secrétaire général adjoint, il eut un challenger. Et comme l’assemblée était majoritairement composée de membres résidant à Niamey et de la génération de Issoufou, Foumakoye Gado sera élu 1er secrétaire général adjoint et Mohamed Bazoum, 2ème secrétaire général adjoint, poste qui a été créé sur le champ en modifiant les statuts qui venaient d’être adoptés.

Mais Issoufou va rattraper cette erreur quand les postes de président et vice président ont été créés. Bazoum occupa ce poste unique depuis le 1er congrès « ordinaire ».

Selon des grands témoins, Issoufou a joué un très grand rôle dans le leadership du PNDS-Tarayya. « Sans lui, nous ne serions pas ce que nous étions devenus. Mais Bazoum lui avait été d’un grand apport, un apport inestimable, décisif. Plus que quiconque dans le parti et hors du parti », nous a confié un pionnier de ce parti.

Si le leadership d’Issoufou Mahamadou a été primé, « c’est aussi une stratégie murement réfléchie qui a amené les responsables du PNDS à se mettre en retrait et mettre uniquement Issoufou Mahamadou en avant », a martelé un autre pionnier du PNDS. C’est le propre des organisations de masse et les grands mouvements historiques. Il est aisé de comprendre que Sankara, Kadhafi, Mandela, Mao, Lénine ou Martin Luther King n’étaient pas seuls mais l’Histoire a retenu leurs noms en ignorant ceux qui ont été sacrifiés à l’autel de l’intérêt général.

En d’autres termes, il faut savoir raison garder. On ne peut travestir l’histoire de ce parti de façon éhontée comme certains sont en train de le faire. Et le comble de la contradiction, c’est quand ceux qui sont en train de légitimer le coup d’Etat prônent paradoxalement l’unité du parti. Un parti politique est une association dont le mérite revient à tous ses membres, chacun selon son apport et le rôle qu’il a joué. Aujourd’hui, les leaders les plus en vue du PNDS doivent avoir sur leur conscience leur ingratitude vis-à-vis de certains grands militants pour leurs apports et leurs sacrifices. Le pire, à l’allure où évoluent les choses aujourd’hui, ce parti risque de perdre son âme, s’il ne l’a pas encore déjà fait, celle incarnant les valeurs comme la solidarité, la justice sociale et son rôle d’avant-garde pour le triomphe de la démocratie et le respect des droits humains. L’Histoire, la vraie, retiendra aussi cette triste réalité.

Elh. M. Souleymane

L’Autre Républicain du jeudi 30 janvier 2025

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